Le prénom
24 mai
Emma, Billie, Jeanne, Lou, Lola d’un côté, Noé, Gaspard, Joseph, Enzo, Sacha de l’autre
À chaque époque son lot de prénoms entendus et réentendus jusqu’à l’écœurement parfois, jusqu’à l’indifférence le plus souvent, tantôt amputés d’une, voire deux syllabes, tantôt déracinés de leur terre, et toujours le même débat : comment faire original sans friser le ridicule, comment faire classique sans être taxé de sale réac ?
Ne rien dire à personne ou mieux, se décider à la dernière minute (puisqu’on aura préféré, bien sûr, ne pas connaître à l’avance le sexe de son enfant) sans se soucier du qu’en-dira-t-on, aussi insidieux qu’un revers lifté sur ligne de fond de court. Sujet donc hautement sociologique, qu’ont eu la bonne idée de mettre en scène sur les planches, puis au cinéma, Alexandre de la Patellière et Matthieu Delaporte, héritiers du duo de choc Bacri-Jaoui, avec dans le rôle de l’antibobo à Rolex (qui assume de rouler en décapotable et de passer ses vacances sur un yacht, lui) le séduisant Patrick Bruel face à un Charles Berling remonté comme une pendule dans son personnage d’intello de gauche.
Évidemment ces deux-là, que tout oppose malgré l’amitié qui les unit depuis l’enfance, n’ont pas le même cahier des charges entre les mains. Tandis que l’un nomme sa progéniture Appolin et Myrtille, en bon bobo du 9e arrondissement, l’autre, agent immobilier prospère, crée la discorde voire l’inssurection au sein de sa famille, durant 1 h 45 de film à huis clos, en révélant le prénom qu’il a choisi pour son enfant à naître. Et pas n’importe lequel. Il fallait oser. Patrick l’a fait. Et rien que pour ça, on court voir Le prénom avant qu’il quitte l’affiche.
Jeanne Ably
