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La Suze

17 mai

“Comme d’habitude, servez une gentiane à Suze”, lançait jadis après une partie de tennis Fernand Moureaux, propriétaire de la distillerie Rousseau & Laurents, pour se moquer de sa belle-sœur. C’est ainsi que Suzanne Jaspart donna son nom à l’un de nos plus célèbres apéritifs français.
2012, la Suze redevient fash. Nostalgiques, nous buvons vintage. Dans notre déco des années 50, nous revendiquons la blanquette de veau et le puits d’amour. De même, la boisson old school à la reine d’or des neiges — entendez la gentiane, racines enfouies dans le sol des monts d’Auvergne et du Jura – fait la conquête de nos apéros.
Né en 1889, elle s’appelait alors le Picotin. Elle a traversé le temps, raflant au passage quatre médailles en récompense d’un « vrai goût français » où l’amertume exalte le sucré.
Dans les années 2000 Sonia Rykiel, Christian Lacroix et Jean-Charles de Castelbajac l’ont honorée de leur griffe, rhabillant dame Suze de haute couture pour des bouteilles collectors. La classe ! Et la preuve aussi que ce breuvage unique n’est pas près de rendre l’âme.
Il était donc vrai que « grâce à sa ruse, le goût de la Suze jamais ne s’use ni ne se refuse ».

Suzanne Ably


Pola

23 jan

Photo : Mr. pergola

Sa mort était annoncée au début des années 2000, ère de prolifération du numérique. Dix ans plus tard, le Pola, immortalisé par Valérie Lemercier dans le film culte Les Visiteurs, opère un retour en force. Plus authentique, plus pratique, offrant surtout une image de qualité « vintage », l’antique boîtier de nos enfances devient l’outil chéri des happy few, lesquels se ruent chez Colette pour se le procurer.

Las de compiler des kilomètres de photos sur leur disque dur sans jamais les palper, ils boudent les apéro-photos-de-vacances-de-Trucmuche sur écran, pas moins soporifiques qu’un discours de mariage, pour s’entre-mitrailler dans les soirées mondaines, avec l’avantage indéniable de repartir les poches pleines de portraits maculés de vin rouge. Idem pour les créateurs qui préfèrent shooter leur mannequin au pola plutôt qu’au numérique ( bien plus chic ).

Résultat : Polaroïd relance son antique Pola, avec un nouveau modèle référencé Z340 capable d’imprimer instantanément la photo mais aussi de la stocker sur une carte mémoire ; la marque Impossible Project lance le film couleur pour Polaroïd 600 ; et, bien-sûr, Apple crée son appli 9.6, pour les radins que rebuteraient les 18 euros que coûte une pellicule de 20 clichés.

Napoléon est mort, la lampe au néon agonise, vive le Pola !

Jeanne Ably


FAT

24 mar

Le bobo, suite.

Que fait-il le dimanche matin, quand reviennent les beaux jours ?  Il part en foire à tout (FAT). 
Foin de grasse mat’, au diable le croissant-Ricoré familial. Réveil à l’aube, comme à l’armée. C’est le seul moyen d’esquiver la foule et les poussettes, pollution notoire.
Chaussée de souliers tout-terrain, munie de sacs xxl, l’armée des bobos se met en branle. C’est à qui dégotera la lampe sixties assortie au canapé vintage trouvé la veille sur un bout de trottoir, et le flight jacket patiné comme il faut à deux francs six sous.
Tous les coups sont permis : doublement  à gauche, queue de poisson, accélérations éclairs. S’agirait tout de même pas de se faire piquer sous le nez ce 45 tours des Stones repéré à dix kilomètres sud-sud-est. Point non plus de scrupules à arnaquer la petite vieille qui se débarrasserait sans le savoir d’un Rembrandt. La meilleure défense c’est l’attaque. Un seul mot d’ordre : marchander pour obtenir. Plus on entassera, mieux ce sera. Quitte à revendre (à perte) à la prochaine brocante ce qu’on rachètera (plus cher) ensuite. La FAT est une discipline échangiste et circulatoire.

Jeanne Ably

Pantalon de grand-père

13 jan



Le grenier, caverne d’Ali-Baba pour les coquettes. On prend l’échelle, on gravit les dunes de poussière, on fend les toiles d’araignées. On pénètre au coeur à la fois des ténèbres et du vintage. À la lueur d’une lampe à pétrole, donc au risque d’un incendie, on déniche des merveilles plus merveilleuses que les trésors des friperies de Bruxelles ou d’Anvers. On jongle avec l’anachronisme, on pulvérise les records d’avant-garde avec la petite robe orange et marron des années 70. On chausse les sabots que portaient la tante Sabine à St-Trop au dix-huitième mariage d’Eddie Barclay. Quelle émotion.
Dans ces fouilles archéologiques, la rage de découverte va bien au-delà des seuls accessoires féminins. On ressort le pantalon du grand-père. Trop grand, en velours, à grosses côtes, “beigeasse”. Il nous va comme un gant, ce qui est le rôle d’un pantalon. Il nous donnera dès demain à la station Abbesses une silhouette plus que chouette.
Pour celles qui n’ont ni grenier ni aïeul, APC a créé une réplique admirable de ce modèle. Accessible sans échelle. On pousse la porte du magasin. On dit bonjour. On essaie la chose. On la paie. On dit merci. On s’en va avec son paquet. Après quoi, pour huit jours,  on nage dans le bonheur.

S.A

 

Street shopping

11 août

La rue est leur terrain de chasse.
Loin du “smirteur” (contraction de smoking et de flirting) qui drague la chair fraîche du bitume en grillant ce qu’il faut de Marlboro light, le “street shoppeur” – souffrez ce néologisme franglicisant – bat le pavé pour dénicher la vieille paire de bottes, le canapé vintage ou le livre introuvable (premier tome des mémoires d’André Salmon chez Gallimard, par exemple) laissés à l’abandon au coin de la rue, par suite d’on ne sait quel déménagement ou autre avatar domestique.
Usage vieux comme le monde, mais qui trouve maintenant sa place dans la sacro-sainte catégorie des phénomènes de mode.
Le bobo, que l’odeur du neuf débecte, l’a compris : bien plus chic qu’Ikéa, qui ne sert qu’à assouvir la fièvre acheteuse du quidam, le trottoir offre à l’élite cette occasion inouïe de pouvoir consommer malin sans contribuer à la production de masse qui tue, comme chacun sait, notre  planète à petit feu.
Moyen pratique et sans grand risque, en outre, de revendiquer son appartenance à la corporation aristocratique des pauvres hères, et même de justifier son récent emménagement à la Goutte d’Or.
Parfum de cour des Miracles, nostalgie de l’épave.
Plus de honte à faire les poubelles ! Désormais, on repeint, on lave, on rapièce, on ressemelle sans la moindre pudeur, pourvu qu’on n’ait pas la même table que tout le monde !

Jeanne Ably

 

Back from Berlin ( épisode 1 )

1 oct

Ach, Berlin, Berlin (prononcer Berline) ! C’est fou ce que cette cité galvanise les ardeurs. La ville la plus cool d’Europe, selon le chœur antique modernisé. Et je me joins à lui. Trois jours à y flâner, m’enivrant de ses atours et me pourléchant de ses modes de vie. Le rêve. D’autant qu’il faisait un soleil triomphal. J’y étais allée une première fois en février, il y a quatre ans : rien à voir. Normal : prenez Paris ou n’importe quelle autre métropole un dimanche soir sous la pluie, le charme n’y est pas.
Ce qui m’a frappé de prime abord à Berlin ? Le look des habitants. Ou plutôt, le fait que tous soient unanimement au top dans ce domaine. N’espérez pas croiser une fille de 25 ans en Tods et tee-shirt Petit Bateau. Ça non ! Ou alors, c’est que l’un comme l’autre de ces deux articles vont redevenir à la mode d’ici peu. Car les Berlinois sont des avant-gardistes forcenés. C’est officiel. Pas de moule prêt-à-former ici, pas de formatage. Des collants rouge fluo par-ci, des bas filés par-là, des cuissardes d’un côté, des baskets vintage de l’autre, et vlà qu’on superpose tous les genres sans complexes. Talons de dix centimètres, OK, mais avec un sweat à capuche. Cheveux orange, pourquoi pas, mais avec look de first lady version Carla.
En somme les Berlinois se font un point d’honneur d’appliquer la devise de Frédéric le Grand : « Jeder nach seiner façon », qu’on traduira  par «chacun ses goûts » ou, chez les Ch’tis de Dany Boon : “chacun ch’mott”. Dans ce contexte, impossible de retrouver à plusieurs exemplaires le même et unique sac griffé Gérard Darel, ou son équivalent germain. Et c’est bien rafraîchissant. Et combien de couples ultra stylés n’ai-je pas croisés sur mon chemin! Comme s’ils sortaient d’une publicité de the Kooples.( Et là, on se dit qu’il est temps de relookez notre mec, si on ne veut pas passer inaperçue. )

Ach! Berlin, Berlin!

J.A


Seconde main

6 sept

La loi économique veut que tout ce qui est gratuit soit gaspillé. Dans la mode, c’est le contraire : tout ce qui est récupéré est magnifié.

Et puis, dans la course aux « it-bag », qu’on se le dise : aussitôt acquis en boutique, aussitôt démodé. Donc, se démarquer.

Rien de tel alors que la brocante dominicale d’un patelin normand : j’y ai déniché ce week-end, pour la (modique) somme de 3 euros, ce sac en python des années 30. Deux stands plus loin, j’en achète un autre pour 1 euros : en simili, avec une chaîne en guise d’anse. J’ai donc bricolé l’un avec l’autre. C’est-à-dire que j’ai ajouté la chaîne à mon sac vintage, pour m’en faire une bandoulière et mettre l’ensemble au goût du jour.

Résultat : un « it bag » que je ne risque pas de retrouver sur la dernière « it girl » venue, future ringardisée professionnelle.

S.A

 

 


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