Tag Archives: burger

Instagram

21 jan

Instagramer l’instant plutôt que vivre sa vie. Hier, on croquait son burger à pleines dents, aujourd’hui on le photographie à toutes sauces et on le met en ligne illico, moyennant un maximum de hashtag. De Barack Obama à Caroline de Maigret en passant par notre Johnny national ou par la future reine d’Angleterre, tous deviennent Instagram-addict, n’hésitant pas à se mettre en scène, l’air pensif et la mèche en bataille, en quête d’un maximum de like. But de l’opération : verser du rétro dans son quotidien et de la poésie dans ses clichés, grâce aux bistouris Nashville, Earlybird ou Rise. Un clic, et clac !, le dîner de copines se transforme en événement du siècle et le village d’enfance en décor hollywoodien. Jamais le monde n’a paru aussi beau que dans l’Instagram. Plus de rides ni de ciel gris ni de blanquette ratée, mais des couchers de soleil de carte postale, des “jolies“ rencontres et des “belles“ personnes en veux-tu en voilà. Du parfait à la pelle. Les marques de mode l’ont bien compris, qui communiquent directement via l’application du bonheur pour pousser leurs produits. Sans parler de lart contemporain qui arbore des photos volées sur Instagram lors d’une exposition de l’artiste Richard Prince à NYC. Le résultat, on le devine :  mêmes plantes vertes à l’arrière plan, même peau de mouton sur chaque dos, mêmes cheveux savamment décoiffés. Tout le monde finit par se ressembler dans cet univers factice, à l’instar d’une Meg Ryan et d’une Nicole Kidman standardisées par le Botox. Pourtant, jamais l’homo ludens – prêt à tout pour capter l’attention de ses pairs – ne s’est senti aussi seul. Les  filtres et autres outils de la palette Photoshop ne lui rendent pas la vie plus rose.

Jeanne Ably

Street food

30 mar

 

Aux oubliettes, l’ancestral jambon-beurre et le vénérable croque-monsieur servis sur le zinc au bon vouloir d’un garçon psychorigide. Place au burger et au hot-dog !

C’est officiel : la Street Food envahit notre capitale. Élevée dans  le besoin maniaque d’un couteau et d’une fourchette, voici la Parisienne réduite à manger avec les doigts sur un coin de trottoir.
Droit débarquée des States, patrie de la malbouffe et du fast-food, la tendance va de pair avec une furie qui s’affirme depuis peu chez nos chefs étoilés et leur clientèle de gourmets. Burger au fois gras sauce à la truffe, burger Colombo, Fish and Chips haddock aneth, toutes les audaces sont permises pourvu qu’on en parle.
Dernier spot à la mode : le Camion qui fume, premier food truck de Paris. Pour les incultes, il s’agit d’un camion-cuisine qui sert des burgers bio moyennant deux heures d’attente et plusieurs dizaines d’euros.
Quant aux magazines branchés, ils organisent des soirées sous le saint patronage de la Street Food. Prochaine en date : la Street Food Graffiti. Programmation alléchante, organisée par le gratuit épicurien le M.I.A.M. 

Plus d’infos ici.

Jeanne Ably

 

Chronologie du bobo

3 mar

Photo : Hélène Pambrun

 

Les bobos : combien d’échanges à leur sujet, combien d’articles de presse, de bouquins, de blogs en leur honneur, de sketchs, de quizz et combien de néologismes infamants : hipsters, boboland, broots, bobo lit, etc. Les pipelettes ne sont pas en reste de rubriques : les bobos et le bio, les bobos et Sopi, les bobos et le streetshopping, les bobos et le hamburger. Etc., etc.
     En ligne de mire : toi, moi, lui, elle, vous, nous tous.
     Démonstration : elle a  entre vingt et trente ans, porte un manteau de fourrure, adore les vieux bistrots et jouer à la pétanque sur les bords du canal : bobo ! Ils ont la trentaine, viennent d’acheter dans le dix-huitième, tiennent un blog et inscrivent leur marmaille dans des écoles privées : bobos ! Vous avez quarante balais, retapez une bicoque, mangez de saison et allez bosser à Vélib ? Bobo ! Eh oui, c’est ainsi : qu’on le soit né ou qu’on le soit devenu, qu’on refuse de l’être ou qu’on le revendique, on est tous des bobos de merde. Impossible d’y échapper.

Un peu de rétropédalage historique à propos de cette espèce proliférante.

2008 : victoire de Barack Obama. Jour de liesse pour le révolutionnaire dans l’âme, qui rêvait du sénateur Palmer de “24 heures Chrono” aux commandes de la planète, histoire d’effacer des siècles d’esclavage et de pouvoir adoooooorer sans scrupules NYC et South Beach.

2001 : élection de Bertrand Delanoë à la mairie de Paris. L’assoiffé de culture et l’adepte du deux-roues ne pouvaient rêver pareille apothéose. Paris plage, Nuit blanche, Expos nocturnes, toutes les occasions sont “juste trop bonnes” pour s’en donner à coeur joie.

2000 : Le terme “bobo” apparaît pour la première fois sous la plume de David Brooks, journaliste, dans un essai intitulé “Bobo in Paradise”, pour désigner ces New-Yorkais à la pointe de la mode qui délaissent l’Uper East Side pour s’aménager des lofts dans des  entrepôts  désaffectés de Brooklyn. Phénomène qu’on appellera plus savamment «gentrification» et auquel est imputée l’augmentation du prix du mètre carré et du kilo de tomates dans les quartiers  populaires.
L’appellation s’étend au monde entier. À Paris, Londres, Barcelone, Moscou et même Marseille, Lyon ou Tours, oubliée la gauche caviar, le bobo devient la star des gazettes et des dîners, le gardien de la pensée unique, le leader des tendances.

1995 : Mise en place des Amap (associations pour le maintien de l’agriculture parisienne). Le bobo préfère trouver de la terre et des cailloux dans sa salade plutôt que des pesticides et du Paraben. Il vous sert des gratins de topinambours et des rutabagas poêlés, merveilles que le banlieusard avait reléguées dans la catégorie des “trucs qu’on mangeait pendant la guerre”.

1984 : Steve Jobs met au point le Mac, assurément plus looké et ergonomique que le PC de Gates (enfoiré de capitaliste). Suivent l’iPod, de l’iPhone et l’iPad (prononcer aïe!) pour lesquels le bobo vendrait père et mère et même sa bicyclette des années 30.

1981 : Création de Radio Nova. Musicalement libre, à fond pour le métissage des cultures et seule capable d’enchaîner un Bob Dylan, un vieux Miles Davis et un morceaux de funk inconnu au bataillon. C’est l’unique radio avec France Cul. à être digne du bobo. Lequel vient d’avoir une grande joie : l’élection de Mitterrand (François) à la Providence de la Ripoublique.

Jeanne Ably

 

Flexitarien

12 avr

Photo : Hélène Pambrun

 

Entendez : semi-végétarien.
       Le flexitarien – contraction de flexible et de végétarien – se proclame ennemi juré de la bidoche mais n’hésite pas à s’en bâfrer si l’occasion fait le lard rond (rires).
       Il se transforme en un redoutable carnassier dès que ça ne lui coûte rien : sorties au restau, méchouis, apéros vin rouge, burger-parties et autres réjouissances auxquelles on l’invite.
       À ses frais, il consomme du lait de soja et des graines en quantité industrielle. Mais dans les somnolences de sa digestion, il vous avoue que son plat préfèré c’est le steak tartare.
       Soucieux du sort réservé au poulet d’élevage, martyr de la consommation, il achète le sien sur les marchés bio. Car “végé” ou pas, le poulet dominical c’est sacré. Faut pas pousser, quand même.
       Bref, notre olibrius a tout compris : à l’instar d’une Gwyneth Paltrow et d’un John Lennon, flexitariens invétérés, il se donne bonne conscience sans trop se sacrifier : un sandwich au pâté, non merci ; mais un toast au foie gras sur lit de figue, ça oui  !
       Sur ce sujet ou presque, lire ou relire “Le Bœuf clandestin”, de Marcel Aymé.

Jeanne Ably

 

Friends

17 mar

Has been la coloc ! Désormais on achète dans le même immeuble que sa meilleure copine. Avantages multiples : mise en commun de l’appareil à raclette ; partage du parking et du 4 x 4 ; wifi et nounou à deux ; babysitting réciproque et à l’oeil, moyennant un Babyphone en indivision (prions pour qu’il n’y ait ni fuite de gaz ni cambrioleurs trop discrets). Plus de soucis de voisinage, plus de copropriétaire grincheux, fini l’étudiant à tapage nocturne, adieu le quinquagénaire exhibitionniste. Terminés les vols de selles et les litiges de paillassons. C’est le paradis. Le dégât des eaux lui-même devient un délice. Vous voilà peinard chez vous à ne plus vous demander quoi dîner quand le frigo est vide, ni où dormir quand vous avez perdu vos clés. Sans parler de la salière vide au moment de saler le Burger-frites.

Aucune raison de se gêner, ça se fait beaucoup chez nos voisins nordiques et dans nos séries télés. Une sorte de néocommunisme à la mode. “Éco-friendly”, dit-on.

Le bobo, nostalgique de la famille nombreuse et soucieux de l’environnement non moins que de son confort personnel, aime partager. Quand c’est avec ses congénères au sein de son immeuble, cela tourne à la passion.

Jeanne Ably

Dimanche

14 nov

C’est dimanche, que fait notre ami le bobo parisien ? Il s’habille, comme les autres jours de la semaine. Pas de survêt qui tienne, ni de vieilles tennis (sauf s’il passe le week-end à la campagne : auquel cas, il se fera un plaisir d’extraire aussi des profondeurs du grenier la parka et les bottes Aigle qui agacent l’autochtone).

Le dimanche, le bobo habillé, comme il faut, court les trésors de sa Ville lumière. Point de trêve dominicale pour cet être avide d’entertainment. L’homos festivus, ayant depuis longtemps déserté les bancs de l’église au profit des cabines d’essayage, rejoint la file d’attente de l’expo qu’il faut voir sous peine de mort sociale.

Il est citoyen cette France qui se lève tôt – le week-end, s’entend. La grasse mat’, il se la réserve pour les vacances, sauf quelques dimanches matin quand il est sorti la veille. Ce qui est rare. Guincher le samedi soir est un plaisir de ploucs.
Journée chargée pour le bobo : d’abord brunch entre potes sur le coup de 14 h, ou burger party chez soi ou dans l’un des innombrables restos du canal Saint-Martin et du Marais. Éventuellement, un peu de sport, avant de se goinfrer (pain et fromage, terrible association au dire des adeptes du dukan). Mais abdos et fessiers se cultivent encore mieux  en semaine, après la journée de boulot, avec un coach à domicile.
Et c’est parti ! La journée s’annonce longue. Elle le sera. Le bobo consciencieux rassemblera ses dernières forces pour la sortie du dimanche soir dans un des clubs à la mode ou dans l’un de ces p’tits resto de quartier où l’on claque la bise au patron.
Autre possibilité : un cinoche au  Mk2 quai de Seine, dont on possède la carte illimité pour des film japonais sous-titrés coréen.
Non, le bobo ne zone jamais dans son canapé devant un blokbuster américain en VF en se gavant de chocolat, ou pire, derrière son mac à tchater sur Facebook . Pour rien au monde ce malheureux ne fera ça. Dure, dure, la vie d’un bobo.

Jeanne Ably

 

La revanche du burger

13 oct

Qui l’eût cru ? Le burger devient branché.  Synonyme de malbouffe pour le “bio-tiful” people et emblème d’une culture américaine en berne, ce sandwich a trouvé une nouvelle jeunesse aux côtés des pommes frites maison et de la salade verte signée Naturalia.
Mais attention, s’agit pas de se le procurer au MacDo du coin, ça non !  L’homo parisianus, bien dans ses baskets tricolores made in NYC, se le prépare lui-même, n’hésitant pas à l’étoffer d’avocat ou de foie gras et à l’arroser d’un saint-estèphe. So chic !  Voilà  la crêpe-party reléguée au rang de goûter d’enfants, et le brunch de pain et de fromage quelque peu distancé. Le « burgie » règne désormais sur la carte des restos branchés avec la même autorité que le croque-monsieur sur celle du bistrot parisien. Témoin, le très hype Floors, dans le non moins hype dix-huitième arrondissement, qui vous le fait manger à toutes les sauces – et sans les doigts, s’il vous plaît.
Résultat de cette nouvelle vogue : Quick  se met à la page en proposant un burger garanti “bio”. On aura tout vu.

Jeanne Ably

 


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