Archive | mai, 2017

Boubour

24 mai

0006794_gal_006_med18670979_1672321023076740_4084528292230491522_n

 

Retour aux sources et mort du politiquement correct ! Désormais on ne se gênera plus pour aimer les grosses bagnoles et l’andouillette sauce moutarde. Fatigué de ravaler ses grivoiseries face aux auditoires Nuit Debout et Mariage pour tous, le boubour (contraction de bobo et de bourrin ) se révèle intolérant à la pensée unique, tout comme le bobo au gluten.

Finies les retraites de méditation au thé vert, abandonnées les missions humanitaires dans les jungles du Nord-Pas-de-Calais. Tandis que d’autres prônent la mixité tout en inscrivant leurs chers petits dans des cours privés hors de prix, le boubour se la coule ostensiblement douce. Il passe ses vacances sur un yacht, porte des costards à dix mille euros pièce et se chausse chez John Lobb. Pur produit d’une droite décomplexée, symbole de la fachisation galopante qui a sacré Donald Trump, type accompli du miracle américain, et qui a failli nous valoir François Fillon, adepte des courses automobiles, l’hédoniste dernier cri ne craint d’afficher ni sa couleur politique, ni surtout ses instincts de dragueur, aussi honnis soient-ils.

Balayés les idéaux socialistes de respect et de justice sociale, incarnés par des modèles aux mœurs aussi pures que DSK et le président à scooter. L’heure est au machisme insolent, autant dire à la frime. Ce qu’il faut c’est laisser libre cours à ses instincts, swiper sans scrupules, se la coller à grand renfort de Ruinart millésimé, exhiber ses pectoraux en acier et ses mollets de centurion. Les années 70 furent une ère de “libération” où la femme s’en remettait à Moulinex plutôt que de s’instagramer dans une Womens March, et vivait dans l’obsession quotidienne d’amortir sa pilule. Nostalgique de ce temps, et amateur de sensations fortes, notre « connard d’hétérosexuel » (pour parler comme Beigbeider, chantre de la boubouritude) remate en boucle les films de super-héros et raffole du métal, ainsi qu’en témoigne la tragédie du Bataclan, où  s’était donné rendez-vous le tout-Paris bobo pour applaudir Eagles of Death Metal, groupe dont  le leader s’est toujours proclamé haut et fort pro-gun et anti-avortement.

Jeanne Ably

 

Breadcrumbing

16 mai

10836479184_ef3f667260_z

Breadcrumbing : littéralement «jeté de miettes de pain», ou comment faire mariner sa victime en lui donnant des nouvelles au compte-gouttes. Qui plus est, du bout des doigts. 

Méthode de séduction masculine vieille comme le monde mais qui connaît un regain à l’ère du téléphone mobile. Un like tous les quinze jours pour entretenir la flamme, un SMS  à 4 heures du matin pour faire renaître l’espoir. Pourtant hyperactif sur Messenger et Whatsapp, Don Juan se garde d’en donner plus. 

Hyperconsommation de l’amour rendue possible par les applications de rencontres qui champignonnent aussi profusément que les bars branchés. Tinder, Happn, Once :  au supermarché de la chair fraîche, le mec change de petites copines comme de marques de  yaourt, balançant dans son Caddie toutes ses envies du jour. Mieux encore, il géolocalise ses proies pour être sûr d’avoir quelque chose à se mettre sous la dent, vite fait bien fait. 

Jouir sans entraves, surtout jouir sans avoir à rendre de comptes ni se donner trop de peine :  has been l’alexandrin, le sonnet, la sérénade. Il suffit désormais de swiper (glissement du doigt vers la droite ou la gauche) pour  sélectionner la promo du jour et profiter des « date courte ». Quitte à rejeter le produit avarié.

Les yeux rivés sur son Smartphone, la jeune fille n’espère plus qu’on lui compte fleurette ni qu’on lui lance des œillades. Au lieu de se laisser draguer dans le métro ou à une terrasse, elle reste à se faire «liker» devant son écran, en quête d’un maximum de « match ».  

Réchauffés, l’amour et le hasard. 

Résidus de micro-ondes. 

Il faut désormais du prêt à consommer, ici et tout de suite.

Jeanne Ably


Social Widgets powered by AB-WebLog.com.